Chers frères et sœurs,
le Seigneur veut nous donner « le royaume des Cieux ». Il est le roi tout-puissant de ce royaume et il veut que nous en devenions les héritiers. Il est notre Seigneur, mais il est avant tout notre Père. Ce royaume, il nous le lègue comme un père transmet à ses fils ce qu’il a de plus précieux. C’est lui-même qui se donne quand il nous donne son royaume.
Saint Paul affirme ceci dans l’épître aux Galates : « Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu » (Ga 4, 7). Voilà l’œuvre éternelle du Père : nous restaurer dans notre dignité de fils en nous communiquant son royaume, par son Fils, dans le Saint-Esprit. Si nous connaissons le Fils, nous possédons le Saint-Esprit, et nous devenons héritiers de ce Royaume car le Saint-Esprit nous tourne vers le Père en nous faisant devenir ses fils. Alors le Saint-Esprit crie en nos cœurs vers le Père. « ‘‘Et voici la preuve que vous êtes des fils, nous dit saint Paul, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie ‘‘Abba !’’, c’est-à-dire : Père ! » (Ga 4, 6). Voilà l’œuvre du Père, voilà comment il établit son royaume en nos cœurs.
Ce royaume, il nous est donné de toute éternité. Ce royaume, il est tout proche, nous n’avons qu’à l’accueillir, le saisir. Dans la première parabole que nous avons entendu, Jésus nous dit que le « royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ». Mais qui l’a caché dans ce champ ? Le Seigneur évidemment. Nous pourrions alors nous demander pourquoi l’a-t-il caché ? N’y aurait-il pas plus de chrétiens si ce royaume était plus visible ? En réalité, demandons-nous plutôt s’il est vraiment caché ? N’est-ce pas plutôt nous qui sommes aveuglés et qui ne le voyons pas ? Pourquoi cet homme a trouvé le trésor caché, n’est-ce pas parce que le Seigneur lui a montré où il était enfui ?
Pour trouver ce royaume, il faut être prêt à quitter ce qui nous empêche de le voir, à l’exemple de cet homme qui vend tout ce qu’il a pour acheter la terre où le trésor est caché. De même, pour recevoir le Saint-Esprit, il faut que nous soyons libérés de tous les mauvais esprits qui nous retiennent ; il faut que nous nous convertissions pour saisir ce royaume qui est tout proche : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche » (Mt 4, 17), nous dit le Christ. Pour voir ce royaume et le recevoir, il faut encore que nous soyons prêts à vivre une certaine pauvreté spirituelle, un certain détachement. « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux » (Mt 5, 3).
La seconde parabole nous dit que pour trouver ce royaume, nous avons à le chercher. « Le royaume des Cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines ». Que cherchons-nous ? Quelles sont « les perles fines » que nous recherchons ? Quelle est l’intensité, la ferveur, de notre recherche du royaume ? Qu’est-ce qui occupe notre esprit quand nous allons au Christ ? Qu’est-ce qui occupe notre esprit quand nous le prions ? Par le Saint-Esprit, lors de nos temps de lecture de l’Écriture ou de nos temps de prière, le Christ veut nous révéler ses mystères, qui sont autant de « perles fines » de grandes valeurs qui enrichissent notre âme et nous communique les prémices du royaume. « À vous, déclare Jésus, il est donné de connaître les mystères du royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là » (Mt 13, 11), à ceux là qui ne le cherche pas, ou encore, à ceux-là qui le cherche mais avec trop de tiédeur, sans désirer se laisser transformer, se laisser convertir par la connaissance de ces mystères rempli de la gloire du royaume. De ceux là, Jésus dira : « ils auront beau regarder de tous leurs yeux, ils ne verront pas ; ils auront beau écouter de toutes leurs oreilles, ils ne comprendront pas ; sinon ils se convertiraient et recevraient le pardon » (Mc 4, 12).
Rechercher le royaume, c’est aussi accepter de prendre conscience que nous ne sommes pas encore pleinement dans ce royaume, que notre chemin de conversion n’est pas terminé et que nous avons encore besoin de recevoir la miséricorde divine. Il est certain que pour nous faire entrer dans son royaume, le Seigneur doit d’abord nous arracher à un autre royaume, celui des ténèbres. « Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, nous dit saint Paul, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé : en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés » (Col 1, 13-14). La rédemption, le pardon des péchés par la miséricorde divine, sont les perles fines que nous avons à rechercher avec toute l’ardeur de notre coeur.
La troisième parabole nous indique que le royaume ne sera pas donné à tous. « Ainsi en sera-t-il à la fin du monde, nous dit l’évangile, les anges sortiront pour séparer les méchants du milieu des justes et les jetteront dans la fournaise : là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. » Certains pensent – et chantent – que « nous irons tous au Paradis », ce n’est pas ce que dit l’Écriture. L’Écriture parle d’un jugement des âmes au moment de la mort (jugement personnel) et à la fin des temps (jugement dernier, voir CEC 1020-1040).
Ce jugement serait injuste si Dieu, le premier, ne venait pas pour nous montrer son royaume et nous en permettre l’acquisition. C’est le sens des deux premières paraboles que nous avons écouté. Nous devons croire que le Père ne cesse de venir vers l’homme, par le Fils, dans l’Esprit, pour le constituer comme héritier de son Royaume. C’est toute la Sainte Trinité qui fait l’assaut de notre cœur endurci.
Si certains sont jetés dans la fournaise de l’enfer, c’est parce qu’ils l’ont choisi. Dieu, par le biais de la Révélation et par l’illumination de notre conscience (loi naturelle), ne cesse de vouloir nous révéler sa loi d’amour, fondement de son royaume. Si nous demeurons opposés à cette loi, si nous ne le laissons pas nous arracher au monde des ténèbres, nous aurons à en assumer les conséquences éternelles. Par contre, si nous laissons le Christ établir sa demeure en nous par le Saint-Esprit, en accueillant sa miséricorde dès cette vie, alors nous n’aurons rien à craindre au jour du jugement. Lorsqu’il nous verra en possession du Saint-Esprit, des prémices du royaume, le Christ nous accueillera en sa paix et nous ouvrira définitivement les portes du Ciel. Là, il régnera parfaitement en nous.
Conscient de tout cela, à l’exemple du roi Salomon, demandons au Seigneur qu’il nous donne « un cœur attentif », pour que nous sachions voir le royaume, le chercher avec ferveur « et discerner le bien et le mal » ; prions pour qu’il donne à tous ceux qui le cherche en vérité, « un cœur intelligent et sage », un cœur semblable à celui de son Fils, un cœur rempli du Saint-Esprit. Amen.
Fr. Elie-Joseph